Peut-on vivre du trading?

C’est une question particulièrement intéressante que l’on me pose régulièrement lors des formations que j’anime et à laquelle

je vais tenter de répondre.

 

Non pas pour sa pertinence (mes excuses à ce qui se la posent ou se la sont posée, j’ai dû d’ailleurs me demander la même chose

il y un certain temps) mais plutôt pour les paradoxes au sujet du trading qu’elle soulève.

 

Tout d’abord tentons de faire une réponse précise. Il y a plusieurs manières de vivre du trading.

 

Travailler dans un fond d’investissement mais vous devrez appliquer la stratégie de ce dernier et vous aurez une autonomie limitée.

Vous serez cependant en contact avec les marchés. Travailler dans une arcade de trading qui vous mettra éventuellement à 

disposition des fonds que vous emploierez en appliquant votre stratégie et d’être rémunéré en fonction des performances que vous dégagerez.

 

Ou faire du trading pour votre compte personnel, activité pour laquelle vous risquerez votre capitalet serez seul maître à bord.

 

Si vous comptez choisir cette dernière option, la question du capital dont vous disposez pour vivre de votre activité se pose.

 

Dégager une performance de 30% par an régulièrement est exceptionnel. Je ne dis pas qu’on ne peutpas faire plus. Cela dépend du marché, de votre stratégie et surtout de votre expérience et de votrecompétence comme dans toute autre activité.

 

Mais beaucoup de gérants de fond aimeraient réaliserune performance de cet ordre.

 

Donc on peut penser qu’en-dessous de 200 000 ou 300 000 euros, il est difficile de vivre de l’activité detrading à titre personnel.

 

Apportons maintenant une réponse plus nuancée. Imaginez que vous soyez en train de créer uneentreprise avec votre associé.

Vous avez une idée. Vous rédigez un business plan, vous investisseztoute votre épargne dans ce projet auquel vous croyez plus que

tout (sinon pourquoi tenter cette aventure périlleuse qu’est la création d’entreprise?), vous sollicitez les membres de votre famille

et vos amis qui vous confient un peu d’argent ou investissent dans votre entreprise car vous les avezconvaincus. Vous allez voir

des banques et des investisseurs, vous étudiez le marché, les clients,toute la chaîne de valeur avec grande attention et

professionnalisme car vous êtes convaincus que votre produit ou votre service va plaire.

 

Est-ce qu’à aucun moment vous vous êtes posé la question de savoir si vous alliez gagner del’argent ? Êtes-vous allé voir votre entourage en leur demandant si cela allait marcher ? Si vous n’enêtes pas convaincus vous-même alors que vous portez le projet comment pourraient-ils l’être à votre place ?

 

Non car créer une entreprise relève de l’engagement total, de la conviction que l’on va y arriver. 

 

Sivous vous demandez si vous allez gagner de l’argent alors vous ne ferez jamais le premier pas.

 

A ce stade, certains doutes sont nécessairement et utilement absents. L’élan vital et la passion que nécessite la création d’entreprise éludent le doute. Je ne dis pas qu’il faut y aller tête baissée et faire n’importe quoi. Je dis juste que la question de savoir si vous allez gagner de l’argent ne se pose tout simplement pas.

 

Eh bien, faire du trading c’est comme créer une entreprise.

 

Vous réunissez de l’argent et vous vous engagez dans une entreprise à l’issue incertaine dans l’objectif de gagner de l’argent. La seule différence, c’est que vous êtes à la fois le patron, le client et le fournisseur.

 

C’est la passion et la conviction que vous pouvez y arriver qui fera la différence. Vous pouvez faire du scalping, du day-trading,

du swing trading, de l’investissement à long terme, avoir une approche value comme Warren Buffet ou une approche orientée

croissance. Peu importe.

 

La différence avec une activité classique c’est qu’elle nécessite un supplément de travail qui peut ne jamais aboutir. Il s’agit d’un

travail profond sur soi et qui vise à corriger les biais émotionnels dont notre enfance, la société et ses normes ont été les véhicules

toute notre existence passée.

 

Un grand trader dit: « on ne traite pas le marché mais ses propres croyances ».

 

Et les croyances sont tout simplement ce qui vous définit.

 

En ce qui concerne le capital nécessaire pour débuter en trading je vais encore faire l’analogie avec une activité « classique ».

Vous pouvez créer une entreprise avec 1000 euros mais ce sera, a priori, plus dur que si vous commencez avec 100 000 euros.

 

Cette affirmation mérite cependant d’être un peu nuancée. Car celui qui commence avec un capital très limité avec la bonne attitude

fera peut-être preuve peut-être de plus de rigueur et d’attention qu’un trader largement doté qui sera moins regardant sur l’argent

dépensé.

 

Un petit mot maintenant sur la composition des rendements. Imaginez que vous ayez un capital initial de 10 centimes d’euros et

que cette somme double chaque jour pendant un mois de 30 jours. Le premier jour vous disposez de 10 centimes, le deuxième

de 20 centimes, le troisième de 40 centimes, etc. jusqu’au trentième jour.

 

De quelle somme obtiendrez-vous à l’issue de cette période?

 

La réponse est 53 687 091,2 euros.

 

Voilà l’effet de la composition des rendements. A chaque fois votre performance s’applique non pas au capital initial mais

à ce dernier plus le rendement associé sur chaque période de temps.

 

Je ne suis pas en train de dire que vous allez doubler votre capital chaque jour bien entendu.

 

Mais si vous obtenez un rendement de 20% par an (soyons ambitieux) pendant trente ans vous aurez multiplié votre capital

par 237. Choisissez le capital initial de votre choix et faites le calcul.

 

Contrairement à ce que l’on peut penser, de grands traders ont commencé avec des sommes a priori ridicules. Certains comme

William O Neil à l’époque où les frais de courtage étaient loin d’être aussi compétitifs qu’aujourd’hui a bâti une fortune sur

les marchés en commençant avec 500 dollars.

 

D’ailleurs si vous débutez en trading et même si vous avez un capital conséquent je vous recommande vivement de commencer avec

une toute petite somme. Les premières années sont très souvent des années où l’on perd de l’argent. C’est une période de

formation et d’éducation et cela coûte invariablement de l’argent. Il ne faut pas sous-estimer le temps nécessaire pour devenir

régulièrement performant sur les marchés.

 

Pour ceux à qui l’on dira: « ce n’est pas possible, il fait avoir un capital très important au départ, laisse ça aux professionnels »,

vous pourrez l’entendre mais pas nécessairement l’écouter. Ce qui est possible de faire, ce n’est pas aux autres d’en décider pour vous.

C’est vous qui déciderez de ce qui est possible ou de ce qui ne l’est pas. Et vous trouverez toujours quelqu’un pour vous décourager

dans vos projets quels qu’ils soient.

 

Pour ce qui concerne les professionnels, en premier lieu les gérant de fonds, la majorité d’entre-eux ne font pas mieux que leur

indice de référence. Leur modèle est plutôt de lever un maximum de fonds sur la base d’une stratégie donnée que de

réaliser une surperformance (qui implique potentiellement plus de risque). En effet ils prélèvent des frais de gestion qui sont

proportionnels à la masse des fonds gérés quelle que soit la performance réalisée à la fin de l’année. C’est leur modèle. Se comparer

à eux n’est donc pas pertinent. Vous n’avez pas le même modèle quand votre seule source de rémunération est une performance

positive et régulière.

 

Quant aux traders compte propre qui travaillent pour les banques, ils ont une rémunération fixe et perçoivent des bonus sur

la base des performances positives réalisées mais ne remboursent jamais les pertes qu’ils peuvent générer. Le seul risque est

d’être licencié bien doté.

 

La comparaison avec ce type d’opérateurs n’est donc toujours pas pertinente.

 

Pour moi un vrai professionnel du trading est celui qui vit de son activité en générant des profits supérieurs aux pertes que sa

stratégie ne manquera pas de provoquer et ce régulièrement.

 

Finalement, par sa nature éminemment psychologique, le trading ou plutôt votre trading vous apportera satisfaction avec

beaucoup de travail mais aussi une grande passion, ingrédient utile voir indispensable afin de franchir les périodes

de doute et de découragement qui sont à mon sens inévitable dans les premières années d’apprentissage.

 

Pour finir, au risque d’être un peu provocateur, il est possible que les personnes qui demandent «Peut-on vivre du trading »

attendent en fait la réponse à la question « Peut-on vivre facilement du trading »?

 

La réponse est définitivement non.